FLORNOYSCOPE – Mars 2024

Le 1 mars 2024

Tous les mois nous vous proposerons une lettre avec les rubriques d’information Focus, Patrimoine, Allocations, Performances, dont les sujets varieront.

La version PDF est disponible ici ou ci-dessous. 

La version papier est disponible sur simple demande.

LE MOT DU DIRECTOIRE

DESTRUCTION CREATRICE

Ces termes sont de l’économiste Schumpeter (1883-1950) et désignent l’impact des innovations sur les entreprises existantes, poussant certaines à disparaître, et d’autres à devenir les nouveaux leaders. Un processus qui renouvelle le capitalisme, sorte « d’ouragan perpétuel » pour reprendre encore les mots de l’économiste. Mais ce qui est frappant avec notre époque est l’accélération des innovations : il aura fallu 50 ans pour que le téléphone atteigne 50 millions d’utilisateurs, 38 ans pour la radio, 22 ans pour la télévision et… moins de 2 mois pour un célèbre logiciel d’intelligence artificielle. De même, l’autorisation en janvier par le régulateur américain d’ETF investis en Bitcoins a drainé en moins d’un mois plus de 5 milliards $, au détriment d’ETF investis « plus classiquement » en or, en décollecte de 2 milliards $. Si les conséquences de ces innovations sont encore largement devant nous, des profits sont en revanche déjà bien réels : Nvidia, société produisant les puces nécessaires à l’IA, est ainsi devenue la 4ème plus grosse société mondiale, en l’espace de quelques mois. Un tourbillon que nous observons avec notre vue d’investisseur de long terme, en essayant d’en discerner les opportunités, tout en restant vigilant sur les risques inhérents à toute nouveauté. Cette réalité de marché nous conforte dans notre choix d’étendre à plusieurs fonds actions le principe du secteur neutre.

Le Directoire

L’EFFET JANVIER

Teddy DEWITTE

Dans notre monde de « poissons rouges » où règne l’immédiateté et la mémoire flash le marché semble perpétuellement condamné à se faire surprendre par des phénomènes dont certains sont pourtant connus et documentés. « L’effet Janvier » fait partie de ceux-là. Il s’agit de la tendance qu’ont les prix à augmenter au cours du premier mois de l’année. Ce phénomène relève plus de l’hypothèse que de véritable fait sur les actifs financiers, notamment sur les actions de petites et moyennes capitalisations. En revanche, sur des indicateurs clés tel que l’inflation, on peut parler de réalité statistique. Quand on mesure à quel point l’inflation et l’emploi ont été seuls aux commandes des influences sur les banques centrales et donc des tendances sur les marchés, cela vaut le coup de vérifier si janvier est une erreur statistique ou bien marque un changement de cap.

REPONDERATIONS ET FACTEURS SAISONNIERS
Les chiffres d’inflation pour le mois de janvier peuvent se résumer par les trois éléments suivants : 1) une hausse des prix, alors que nous n’étions témoin jusqu’alors que d’une baisse continue, 2) par une repondération des composantes du panier de l’indice des prix à la consommation et 3) par l’influence de facteurs saisonniers tels que les augmentations annuelles des prix de produits ou services administrés (transports publiques, indexation de loyers, cotisations de santé, etc…). Tous ces phénomènes se passent en janvier et leur ampleur n’est pas constante d’une année sur l’autre. Ces points sont effectivement à l’origine de la progression plus forte qu’attendue de l’inflation mais ne suffisent pas, loin s’en faut, pour changer la trajectoire actuelle. Au mieux, ils rappellent que le cadre temporel sur lequel les banques centrales fondent leurs analyses et leurs actions, est plus lent que celui des marchés. Après tout nous avions bien à la sortie de l’été 2023 des anticipations de baisse de taux courant 2024 de l’ordre de 75-100bp, soit 3 à 4 baisses de 25bp. Ces anticipations ont littéralement doublé sur décembre-janvier grâce à la combinaison parfaite d’une inflation qui s’effondre et d’un marché de l’emploi qui se normalise tout en conservant des salaires réels élevés. Plus aucun obstacle ne se dressait devant les banquiers centraux pour baisser significativement les taux afin de ne pas ralentir inutilement les économies. Après les chiffres de janvier, les marchés repricent à nouveau « seulement » 3 à 4 baisses aux Etats-Unis, s’alignant ainsi avec la rhétorique plus rigoriste qu’anticipé de la Fed. Le plus surprenant est peut-être qu’il en soit exactement de même pour l’Europe alors que cette dernière ne bénéficie pas de la même dynamique. .

SITUATION EUROPE vs US : LE FOSSÉ
L’écart se creuse partout : sur l’activité, sur l’inflation, sur les bénéfices par actions prévisionnels et sur (ou à cause de) la révolution de l’intelligence artificielle. Difficile de ne pas mentionner l’IA tant elle est omniprésente. C’est devenu un mégatrend à elle seule, la révolution de l’IA avait besoin du passage du microprocesseur CPU (central processing unit) au microprocesseur GPU (graphics processing unit), et du passage du « general computing » vers le « accelerated computing ». Ses applications commencent à bouleverser des acteurs historiques « champions d’hier » (cf. Téléperformance). Grâce à elle, les 5 premières actions du S&P constituent 25% de l’indice et les actions américaines représentent désormais 70% de la capitalisation mondiale, contre 50% il y a dix ans ! Les arbres ne grimpent certes pas au ciel, et certains parlent de bulle, mais il a fallu 4 ans avant que « l’exubérance irrationnelle » d’Alan Greenspan (1996) ne se matérialise par l’éclatement de la bulle internet. Bank of America prévoit encore de la progression pour le secteur avant ce stade, surtout compte tenu de la très forte croissance des ventes et de la rentabilité majeure qui faisait défaut aux valeurs internet en 2000. Ce qui est certain, c’est que cette concentration représente un risque de correction important pour l’indice américain. Dans cette perspective, il est intéressant de noter les ventes significatives d’actions d’initiés tels que Jeff Bezos (Amazon), Mark Zuckerberg (Meta), Bill Gates (Microsoft) ou encore Jamie Dimon (JP Morgan) au cours du mois de février.

DÉTENTION D’UN PATRIMOINE DANS UNE SOCIÉTÉ CIVILE SOUMISE A l’IMPOT SUR LES SOCIÉTÉS (PARTIE 1)

Nora FAUGERE

La société civile est une solution fréquemment proposée pour organiser la gestion et la transmission du patrimoine familial. Ce mode de détention présente aussi pour avantage de permettre l’option pour l’impôt sur les sociétés (IS), souvent plus favorable.

UN TAUX D’IMPOSITION LIMITÉ ET DES RÉGIMES DE FAVEUR SPÉCIFIQUES
En cas d’option pour l’IS, la société est imposée selon des règles propres, différentes de celles de l’impôt sur le revenu. Après déduction des charges, les revenus sont soumis à un taux d’imposition de 15 % jusqu’à 42 500 € (sous conditions) et 25 % au-delà.

L’impôt sur les sociétés permet, en outre, d’accéder à certains régimes de faveur, notamment :
– Le régime du report d’imposition de l’article 150-0 B ter du Code général des impôts, permettant la mise en œuvre d’opérations dites « d’apport-cession ». Ce type de stratégie peut être recommandé dans certains cas pour limiter l’imposition en cas de cession d’entreprise. Le prix de cession sera alors appréhendé par la société soumise à l’IS.
– Le régime « mère-fille » qui permet, sous conditions, la remontée de dividendes avec une fiscalité très réduite.

DES REVENUS NON IMPOSÉS POUR LES ASSOCIÉS EN L’ABSENCE DE DISTRIBUTION DES RÉSULTATS
Lorsque la société relève de l’IS, les associés ne sont pas imposables sur les revenus de la société. Ce régime d’imposition est donc particulièrement adapté dans une phase de développement patrimonial. L’associé n’aura pas à subir d’imposition sur des revenus qu’il fait le choix de réinvestir dans la société, ou qu’il doit affecter au remboursement d’un emprunt.
En cas de distribution de dividendes, les revenus sont taxés selon les règles des revenus de capitaux mobiliers. Des prélèvements sociaux au taux de 17,2 % sont alors retenus à la source. Les dividendes sont également soumis à l’impôt sur le revenu :
– Ils sont, en principe, soumis au taux forfaitaire de 12,8 %.
– Ils peuvent, sur option, être soumis au barème progressif de l’IR, après un abattement de 40 %.
La distribution de dividendes n’est pas le seul outil à disposition pour sortir des liquidités. En fonction des circonstances et de l’objectif recherché, l’on peut par exemple envisager de procéder à une réduction de capital non motivée par les pertes. Lorsque la société procède au rachat de ses propres titres, le régime d’imposition est alors celui des plus-values mobilières.
La trésorerie de la société peut aussi être appréhendée au moyen de remboursements du compte courant d’associé. Le compte courant d’associé est une forme de prêt consenti par l’associé au profit de la société. Lorsque l’associé dispose de liquidités qu’il souhaite investir via la société, ce mode de financement peut être une alternative à l’apport en numéraire, qui viendrait augmenter le capital social. Un compte courant d’associé peut aussi naître lorsque la trésorerie de la société est insuffisante, obligeant ainsi les associés à laisser des fonds à disposition de la société.
Le remboursement du compte courant d’associé ne fait l’objet d’aucune fiscalité sur la part du capital prêté à la société. Seuls les intérêts versés sont imposables pour l’associé. Ces derniers sont également, sous conditions, déductibles pour la société.

DANS QUELS CAS UNE SOCIÉTÉ CIVILE EST-ELLE SOUMISE A l’IS ?
La société civile peut être soumise à l’IS sur option. Une telle option peut être formulée lors de la constitution ou plus tard dans la vie de la société. Dans ce second cas, le changement de régime fiscal peut déclencher une imposition. Il faut donc impérativement chiffrer et anticiper les conséquences d’un tel choix.
Les règles de l’IS peuvent, dans certains cas, trouver à s’appliquer en l’absence d’option, notamment lorsque les parts sociales sont détenues par une ou plusieurs sociétés relevant de l’IS.

Dans notre seconde partie, nous nous intéresserons aux différents types d’actifs pouvant utilement être détenus au sein d’une société à l’IS…

NOS VUES

L’effet janvier évoqué en section FOCUS a douché les espoirs et coupé de moitié les anticipations de baisse de taux sur 2024. D’un côté aux Etats-Unis, la Fed temporise et demande de la patience pour s’assurer que l’inflation ne reprend pas des forces nouvelles grâce à la bonne tenue de l’activité économique. La hausse de la composante loyers l’a notamment inquiété (44% du poids du CPI). De l’autre en Europe, la BCE attend la fin des négociations salariales avant d’entamer le processus de baisse. Ni nous, ni le marché n’avons de doute sur la trajectoire. En revanche le timing ne cesse d’être reculé. Mai pour la Fed et Juin pour la BCE au lieu de respectivement Mars et Avril. Nous conservons évidemment notre biais positif sur les marchés obligataires et nous affinons les parties de courbe et les produits. Sur les courbes, nous anticipons assez logiquement des pentifications et nous restons favorables aux parties courtes pour bénéficier des baisses de taux directeurs et du portage. Au sein de la dimension crédit, nous continuons à privilégier les financières senior plutôt que les corporates. Du point de vue géographique, nous conservons notre surpondération sur les financières des pays du Sud. En termes de spread de crédit, il y a encore de la place sur les signatures de bonne qualité (investment grade) et nous commençons à être plus attentif et sélectif au sein du high yield. En effet, les spreads se sont beaucoup resserrés et ce segment a parfaitement joué son rôle, rémunérant bien le risque sur les dernières années. Avec la baisse à venir des taux, se pose la question de la mobilité des liquidités actuellement investies sur le monétaire. Les actifs cibles profiteront inévitablement du flux, à l’instar du Bitcoin devenu fréquentable car institutionalisé (+40% en 1 mois). Sur les actions, nous assistons au phénomène « FOMO » (Fear Of Missing Out : la peur de manquer quelque chose) et comme toujours la situation est plus complexe que la simple lecture au niveau des indices qui ont progressé pendant 14 semaines sur 15 ! A croire qu’il y a eu des stops à l’achat. La prime de risque des actions, mesurée par les rendements de l’indice S&P500 moins le taux monétaire 3 mois, est au plus bas depuis la bulle « Dot com » il y a 24 ans. Parallèlement, les 7 géants « magnifiques » de la tech affichent des multiples de valorisation beaucoup moins affolants qu’à l’époque puisqu’ils dégagent d’énormes revenus et avec une croissance soutenue. Leurs ratios de revenus générés ajustés de la croissance les font même passer comme étant beaucoup moins chers que le reste du marché. Un comble. Pour couronner le tout, 77% des entreprises ayant publiés leurs résultats T4 2023 ont fait mieux qu’anticipé. Pour autant, nous pensons que le marché a besoin de souffler et de trouver des relais ailleurs que sur la tech pour alimenter la hausse. Nous avons donc légèrement réduit la voilure et conservons une exposition neutre sur les actions. Nous garderons probablement cette pondération jusque l’été, moment où la saisonnalité devrait passer positive.

TABLEAU DE BORD

LE CAP DE LA GESTION COLLECTIVE FLORNOY

Actions

Positionnement cible : 50% (-4%) défensives, 44% (+2%) cycliques, 6% (+2%) cash

Secteurs :                      renforcement : Monetaire

                                     allègement :     Constructions, Conso discrétionnaire, Banques

Obligataire

Positionnement cible :  49% (-3%) taux fixe, 49% (+2%) taux variable, 0% (=%) convertibles, 2% (+1%) cash  

Rating :  47% (=%) invest. grade, 42% (-1%) high yield, 10% (+1%) non noté, 2% (+1%) cash

Secteurs :  77% (-2%) finance, 11% (=%) industrie, 2% (=%) techno/com, 3% (=%) biens conso
cyclique, 1% (+1%) biens conso non cyclique, 1% (=%) matériaux de base, 3% (=%) énergie, 2% (+1%) cash

FONDS FLORNOY FERRI